POÉSIE - SLAM - ROMAN Les chroniques de l'exclusion : c'est le titre du livre dont je finalise l'écriture actuellement. C'est un roman qui traitera d'homophobie parentale, de rejet mais aussi de l'histoire d'amour fusionnelle entre deux adolescents que la vie a rapproché malgré leurs craintes respectives.
26 Mars 2020
Bonjour à tous, aujourd'hui je rend honneur à toutes celles et tous ceux qui travaillent dans la rudesse et la fraîcheur du matin. Celles et ceux qu'on ne voit pas forcément, qu'on a rarement regardé d'ailleurs. Celles et ceux sans qui nous ne pourrions pas vivre en ce temps de confinement, et qui contribuent à faire que nous ne manquions de rien dans notre chaîne alimentaire.
Dixième jour, réveil prématuré, comme si mon corps avait réagi au spectacle étrange qui se tramait dehors. Des étoiles vaseuses encore dans les yeux, je m'approche pour contempler ce paysage urbain, encore bâché par le brouillard. Je m'approche un peu plus, intrigué par cette lumière qui se reflète dans le voile d'humidité plus que de raison, et là stupeur. Il neige ! Une fine pellicule blanche s'est déposée sur les toitures et les voitures, pour certaines garées là depuis plus de dix jours, abandonnées par leurs propriétaires, qui n'en ont plus l'usage... Je distingue à peine les monts qui me font face, le Pilat se devine encore sous le fin manteau qui le recouvre, même si le sommet est perdu dans l'obscurité du jour qui ne s'est pas encore levé. Curiosité d'ailleurs, j'ai quitté le jour précédent par un temps printanier, comme depuis ces dix jours de confinement. Que s'est-il donc bien passé en ces quelques heures d'obscurité pour que le printemps et ses bourgeons ne remontent le temps de la sorte ? La rudesse de l'hiver a fait une attaque surprise, et sa morsure fut sûrement une mauvaise blague pour tous ceux qui, malgré le confinement, se lèvent encore tôt.
C'est ainsi que j'en viens à me demander ce qu'il peut bien se passer au delà des monts qui me font face, pour ces gens qui sont déjà debouts, font déjà tourner leur exploitation, et qui, par nécessité vitale pour nous pauvres humains enfermés dans nos murs et nos œillères, ne vivront jamais la sécurité du confinement. Ces personnes, les agriculteurs, comme souvent nous les avons encore oubliés. Pire lorsque notre président s'est rappelé à eux, par l'intermédiaire de son sinistre de l'agriculture, c'est pour leur proposer l'aide la plus absurde en tant de confinement, de la main d'oeuvre pas chère, sacrifiée sur l'hôtel d'un air toxique... Comme si le libéralisme n'avait décidément pas encore compris ses fautes, et son rôle dans cette crise...
Pourtant ces agriculteurs, eux, triment sans compter, l'argent qu'ils ne gagnent pas. Cette aide, ils l'attendaient pourtant, depuis longtemps, mais il faut croire que l'argent ne fait définitivement pas le bonheur. Ces gens qui travaillent comme des acharnés pour que nous puissions encore manger, on ne les applaudit pas, comme tout le reste de la chaîne alimentaire, jusqu'à l'hôte de caisse sur qui nos plus égoïstes s'excitent car il manque un rouleau de PQ dans le rayon, ou que les tomates ne sont pas mûres en plein hiver... Non on ne les applaudit pas, pourtant sans eux nous ne sommes rien, sans eux on ne pourrait prendre soin.
Ils sont les soignants de notre quotidien, les soignants de ceux qui ne sont pas malades, et au même titre que nos personnels de soin, je les applaudis chaque soir, quand au soleil couchant, ces petites mains, ces maillons d'une chaîne alimentaire vitale, usés par les morsures d'un hiver qui est revenu par surprise, s'en vont trouver le repos, auprès de leur foyer ou dans la solitude d'une nuit sans chaleur, confinée. Ils sont ceux qui se trouvent par delà les monts, nos merveilles.